-
Les tireux d' fichelles de Lille et de Roubaix
De nombreux noms de marionnettistes sont restés dans les mémoires comme celui d’Alphonse Fiew dans le quartier de Wazemmes, à Lille, avec le théâtre d’Artagnan ; celui de Charles Muller installé dès 1888 à Saint-Sauveur ou encore celui d’Henri Buisset ouvert en 1892 dans le même quartier. À Roubaix, on peut citer le théâtre d’Edgar Créteur, rue de l’Epeule présent dès 1864 ou celui des « enfants du Nord » d’Isidore Lecocq, rue des Longues Haies, ouvert en 1867.
A côté de ces comédies fixes, il existe toujours des théâtres forains de marionnettes qui s’installent de ville en ville et perpétuent cette tradition. Les comédiens de bois y sont toujours à fils et à tringle, parfois de plus petites dimensions ; les pièces sont plus courtes et les répertoires plus réduits. Citons le théâtre Pajot et son spectacle Jeanne de Flandre, théâtre qui deviendra avec la mode du Music-Hall ou du goût anglo-saxon « Le théâtre Pajot-Walton ».
Au XIXe siècle, nombreuses sont les pièces mélodramatiques qui proviennent de la nouvelle industrie dramatique des théâtres à public populaire du Boulevard du Temple à Paris, très vite surnommé le « Boulevard du crime » du fait que ces théâtre en vogue tels que les théâtres de la Porte Saint-Martin, de la Gaîté ou des Funambules diffusaient des pièces mélodramatiques représentant des scènes de crimes.
Cette effervescence narrative agitant la capitale alimente ainsi directement ou indirectement les théâtres de marionnettes en drames historiques, en pièces d’aventure, féeries et surtout mélodrames. Pour Adèle Pajot-Walton, les théâtres forains participent tout comme les imprimés à la diffusion auprès du public de province de cette grande diversité du répertoire. Toutefois, ces adaptations n’ont rien de mécanique et supposent de la part des montreurs des choix et un travail de réécriture pour élaborer des «canevas» inédits et attrayants.
A Lille et à Roubaix Louis de Budt à Lille et Louis Richard à Roubaix restent les figures les plus importantes de ce savoir-faire populaire pour leur travail unique de création et de fabrication qu’ils ont réalisés.
Avec l’arrivée du cinéma et l’installation des salles de projection, les théâtres de marionnettes perdent progressivement leur public. Les descendants résistent pendant quelques années comme Gustave de Budt ou Léopold Richard mais en 1940 le dernier théât’, à Roubaix, tire le rideau.
Dans les années 30, des sociétés folkloriques tentent de sauvegarder la marionnette à tringle mais aussi les patois locaux. Si cela réussit à Amiens avec le théâtre Chés cabotans, il faudra attendre les années 80 pour que le Théâtre Louis Richard s’impose à nouveau dans le paysage roubaisien. À Lille, seul Jacques est toujours présent. Il est désormais « à gaine » mais conserve son espièglerie et sa place prépondérante grâce au Théâtre P’tit Jacques créé en 1989.